Earth: Daylight music for the Nighttime

Publié le par Yves Tradoff

 On aurait aisément pu le deviner : Dylan Carlson, le leader emblématique du groupe Earth, n’est pas quelqu’un de très bavard. A l’occasion de la sortie du nouveau disque d’Earth, Angel of darkness/Demon of light 1, nous avons pourtant tenter de le sortir de son silence.

 

Earth et Dylan Carlson/Earth est Dylan Carlson

Est-ce le “1” contenu dans le titres Angel of darkness/Demon of light 1 a une signification particulière ? Est-ce un disque en quelque sorte « to be continued » ?

Nous avons enregistré suffisamment de musique pour remplir deux albums. Je ne sais pas quand le reste va sortir, peut-être dans deux ans.

J’ai cru percevoir deux périodes dans Earth, la première ou Dylan Carlson régnait en maître sur le projet et la seconde qui laisse plus de place à un groupe de personnes.Es-tu d’accord avec ce constat ? Si oui, est-ce la raison pour laquelle il y a plus d’espace qui est accordé aux autres instruments dans ce nouveau disque ?

earth-gens2.jpgJe n’ai jamais voulu être le dictateur du groupe (rires). Après, c’est vrai qu’avec les années, Earth est devenu quelque chose de plus collectif notamment parce que je préfère maintenant jouer de manière plus spontanée. Mis à part Old Black qui a été composé il y a environ un an, la plupart des titres ont été créés deux semaines avant d’entrer en studio. En outre, la dernière chanson (NDLR la dernière chanson, Angels Of Darkness, Demons Of Light 1 fait 20 minutes, soit près d’un tiers du disque) est une improvisation issue de notre session en studio.

Es-tu pleinement satisfait avec Earth ou envisages-tu un projet solo ?

Pour le moment, je reste concentrer sur Earth. Après, j’aimerais bien faire un projet solo. J’ai déjà une idée de ce que ça pourrait donner. Ce sera à la fois quelque chose de différent et de proche dans la mesure où j’ai l’habitude de jouer d’une certaine manière. En revanche, je ne sais pas quand je pourrais l’enregistrer. Avec un peu de chance, plus tard dans l’année.

Dans ce cas, tu ferais tous les instruments ou tu laisserais à d’autres personnes le soin d’enregistrer la batterie, la basse, etc. ?

Je ne suis pas sûr de la façon dont je vais procéder parce que pour l’instant, je conserve ça uniquement en tête. En plus, l’année prochaine sera dense, car nous serons en tournée. Nous ferons probablement un passage en Europe en avril et mai (NDLR : depuis l’enregistrement de l’interview, Earth a annoncé un passage au Nouveau Casino le 13 avril à Paris.) et les U.S en été. L’année prochaine, nous passerons également par le Japon et l’Australie.

Le son Earth

Est-ce difficile de se voir attribuer le statut de créateur d’une scène musicale, en l’occurrence, le drone ?

Je suis reconnaissant du fait que les gens apprécient suffisamment notre musique pour en faire une influence. Toutefois, je reste persuadé que chacun a sa propre marque, qu’il s’agisse de Sunn O))) ou d’autres groupes. Me concernant, la musique se suffit à elle-même : je ne ressens pas le besoin d’être membre d’une scène, d’un gang ou autre chose (rires).

Pour quelle raison avez-vous réenregistré d’anciens titres en 2007 (Hibernaculum) et 2010 (A Bureaucratic Desire…) ?

Les chansons n’ont pas été réenregistrées, elles ont uniquement été remastérisées. Je ne ferais jamais de nouvel enregistrement d’anciennes chansons. Un disque représente une époque particulière et tu ne peux pas récréer ce moment. Si nous avons procédé à une réédition de notre premier disque, c’est parce qu’il n’est jamais sorti de la façon dont je voulais qu’il sorte. Il a été commercialisé sous forme d’EP, de bootlegs et non comme un album à part entière alors que c’était prévu au départ. En plus, The Bees Made Honey In The Lion’s Skull était sorti depuis trois ans et j’ai pensé que c’était une bonne chose à faire pour les fans qui attendaient que le nouvel album sorte.

Dans une interview accordée au magazine en ligne Pitchfork, tu déclarais « une musique ne peut pas être plus lente et simple que le drone ».Est-ce que tu considères que la musique DOIT toujours être simple ?

J’ai lu un texte qui disait que la différence entre le bruit et la musique était à voir dans le niveau d’accessibilité : le bruit est complexe tandis que la musique est une simple répétition de mélodies. Plus la musique est dense, moins elle est de la musique et donc plus elle est du bruit. À mon sens, plus tu réduis la quantité de matériel que tu utilises, plus l’impact est puissant.

Earth en images

As-tu déjà envisagé d’utiliser la musique d’Earth comme B.O d’un film ?

Ce que j’apprécie dans la musique, c’est qu’elle possède différentes dimensions, dont la dimension visuelle. Elle permet aux auditeurs de participer, car ils peuvent donner leur propre sens aux sonorités, parfois même au-delà des paroles elle-même. J’ai d’ailleurs toujours trouvé intéressant de voir que des chansons sans paroles procuraient la même sensation ou la même expérience chez beaucoup d’auditeurs. La musique est une façon différente de communiquer que la parole.

Personnellement, j’aime écouter ce que vous faites en fin de journée. Votre musique symbolise pour moi « le calme après la tempête » comme on dit en français. À ton sens, dans quelle situation la musique d’Earth est-elle la plus adaptée ?

Certaines personnes m’ont dit qu’ils aimaient écouter Earth en conduisant, ce que personnellement je trouve dangereux (rires). Après, je n’écoute pas beaucoup ma propre musique. Lorsque c’est le cas, c’est souvent la nuit avant d’aller dormir. Ça m’aide à trouver le sommeil.

Globalement, je préfère la musique qui aide à dormir plutôt que celle qui réveille. Et la composition en tant que telle ?

Je suis quelqu’un du matin et j’enregistre généralement dans la journée.

Si on récapitule, c’est donc de la musique de journée à écouter la nuit (Daylight music for the Nighttime) ?

Oui, c’est ça. Peut-être que je l’utiliserais pour un prochain album (rires).

Angels of darkness, Demons of light 1 : la chronique

Earth-pochette.jpgLa musique d’Earth ne permet pas de longs discours. Nous éviterons donc les longues suites de digressions afin de ne pas frustrer la communauté de fans forgée par la force du temps – le groupe a presque 20 ans d’existence.

Sachez tout de même que les fondamentaux de Earth ne seront pas bouleversés avec ce nouvel album. Le guitariste Dylan Carlson joue comme il a l’habitude de jouer : ses mélodies de guitares traînent sur un instrumental déjà languissant. Les mélodies sont simples, mais leurs répétitions sur des chansons très longues – la plupart des titres sont aux alentours des 10 minutes – permettent de rentrer de plain-pied dans un univers très largement contemplatif. Après, chacun se fera son image selon l’état d’esprit dans lequel il se trouve : la simplicité musicale d’Earth pourra faire penser à un hymne au désespoir et aux rêveries post-apocalyptiques comme il pourra générer un bien-être et un calme salvateur. C’est à vous de voir, vraiment.

Le changement le plus notable est l’apparition d’un violoncelle et la mise en avant plus prononcée du reste des instruments. La guitare règne toujours en maître, mais ce petit chamboulement donne l’impression d’un disque plus abouti, d’un style plus serein et l’occasion d’apprécier encore plus la nouveauté que représente ce disque.

Discographie

1993 : Earth2 (Sub Pop)

1995 : Phase 3 : Thrones and Dominions (Sub Pop)

1996 : Pentastar : In the Style of Demons (Sub Pop)

2005 : Hex : Or Printing in the Infernal Method (Southern Lord)

2007 : Hibernaculum (Southern Lord) 2008 : The Bees Made Honey in the Lion’s Skull (Southern Lord)

Crédits photo : Melchior Ferradou (http://www.flickr.com/photos/melchiorferradou)

Cet article a été publié le 21 février sur Discordance.fr.

Pour plus d'informations :

Earth, Angels of darkness, Demons of light 1, 21 février 2011, Southern Lord/Differ-ant.

Earth sera en concert le 13 avril au Nouveau Casino (Paris). Date unique en France.

Myspace : http://www.myspace.com/earthofficial

Site officiel : http://www.thronesanddominions.com/

Publié dans Culture

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